LA PESTE NOIRE
Au cours de l'hiver
1111, le clan Pestilens libéra une affreuse calamité
sur l'Empire. Les adeptes du clan Eshin déversèrent
le contenu de fioles empoisonnées dans les citernes des villes
et les épidémies se répandirent parmi la population
humaine comme une traînée de poudre. Les premiers symptômes
étaient des marbrures noires qui finissaient par s'étendre
sur tout le corps. Les articulations gonflaient et finissaient par
éclater, faisant sombrer les victimes dans une douloureuse
et interminable agonie.
En quelques minutes ou au bout
de plusieurs semaines, les contaminés succombaient dans d'atroces
convulsions, s'agitant comme des poissons tirés hors de l'eau
jusqu'à ce que leur nuque finisse par céder. Les citoyens
de l'Empire baptisèrent le fléau Peste Noire, mais beaucoup
craignaient même de seulement en parler.
L'épidémie se
déclara simultanément à Nuln, Altdorf et Talabheim.
Les routes et les rivières par lesquelles transitait le commerce
de l'Empire propagèrent l'épidémie plus vite
et plus loin que n'aurait pu le faire le clan Eshin. Bientôt
les villes fermèrent leurs portes aux misérables réfugiés
qui fuyaient la maladie, mais elles finirent par succomber une par
une à l'épidémie ou à leurs propres maladies
causées par la surpopulation qui s'ensuivit. Middenheim ferma
ses viaducs très tôt et put ainsi échapper à
l'épidémie. Partout ailleurs, les villages furent balayés
par l'épidémie, les villes furent abandonnées
et les cités devinrent des mouroirs où les vivants croulaient
sous les cadavres. Les hommes priaient leurs dieux mais rien n'y faisait.
Des bandes de flagellants parcouraient l'Empire, proclamant que la
colère de Sigmar s'abattait sur le pays parce qu'il était
corrompu.
Avec l'arrivée du printemps,
l'emprise de la Peste Noire s'affaiblit et le Conseil des Treize lâcha
les clans guerriers contre l'Empire moribond. Des hordes de guerriers
des clans déferlèrent sur les villes désertées
et dans les villages du sud de l'Empire, massacrant les défenseurs
affaiblis dans une débauche de cruauté. Les vivres et
le bétail furent volés et emmené sous terre.
Des douzaines de villages furent brûlés, souvent avec
leurs habitants. Vertholf Bergon de Nuln décrivit les terres
environnant la cité comme "Une vision d'enfer, les terres
assombries jusqu'à l'horizon par la fumée des bûchers
qui embrasaient le ciel de rouge et répandaient des nuages
de ténèbres aussi loin que portait le regard ".
Dans le sud, seules les grandes
cités échappèrent aux ravages des armées
skavens. Au nord, la peste tenait toujours le pays dans une poigne
de fer. Après des années de corruption et de négligence,
les armées impériales étaient sans défense
contre les rejetons du Rat Cornu.
En 1115, Boris l'Avide, le
plus haï et le plus incompétent des Empereurs succomba
lui-même à la peste et les habitants opprimés
eurent enfin quelque chose à fêter. L'Empereur fut une
des dernières victimes de la grande peste, son emprise s'étant
amoindrie les quatre dernières années précédente.
Mais en 1115, près des trois quarts de la population avait
succombé à la peste ou aux skavens. De grandes parties
de l'Empire avaient été dévastées et les
armées skavens marchaient ouvertement dans tout le Reikland,
l'Averland et le Talabecland. Chaque hiver, des milliers de personnes
mouraient, victimes de la faim dans les quelques rares cités
qui avaient échappé aux ravages de la maladie ou de
le guerre.
A Skarogne, le Conseil des
Treize se réunit et jugea qu'il était temps de porter
le coup de grâce. Ils levèrent des armées capables
de vaincre les ultimes résistances et de réduire en
esclavage les derniers humains de l'Empire.
Durant les sept années
qui suivirent, les skavens commencèrent à systématiquement
réduire en esclavage les humains des villes rescapées.
Des nuées de guerriers des clans se rassemblaient autour d'une
ferme ou d'un village pour y mettre le feu durant la nuit, interceptant
les occupants qui s'enfuyaient. Ils menaient d'interminables colonnes
d'hommes, de femmes et d'enfant vers les camps d'esclaves des ruines
d'Ubersreik dans le Reikland et de Pfeildorf dans le Wissenland. Ceux
qui avaient la chance de rester en surface cultivaient la nourriture
nécessaire pour les hordes skavens, alors que les moins chanceux
étaient envoyés dans les mines ou les forges du Cloaque.
Des familles entières étaient emmenées en captivité,
condamnées à ne jamais revoir le soleil.
A mesure que les esclaves et
le butin prélevé sur les cadavres s'amoncelaient, le
prestige du clan Pestilens s'accrut considérablement. Même
les autres Seigneurs de la Ruine ne pouvaient nier que le quasi effondrement
de l'Empire était dû à la puissance de leur Peste
Noire. Aucun Seigneur de la Ruine n'osant prendre ouvertement parti
contre eux, les Seigneurs de la Peste parvinrent à occire deux
membres du Conseil et s'assurèrent ainsi trois places au sein
de celui-ci. Les autres Seigneurs de la Ruine retournèrent
dans leurs forteresses respectives pour mettre au point un moyens
de lutter contre l'ambition et la réussite des Seigneurs de
la Peste.
Pendant ce temps, les armées
skavens marchaient vers la province de Sylvania, jusque là
épargnée. Au début de la grande Peste Noire,
de fortes chutes de météorites émanant de Morrslieb
s'étaient abattues sur cette province ténébreuse,
et les skavens s'y rendaient à présent pour recueillir
la male pierre. A leur grand désarroi, ils furent confrontés
à de fortes bandes de goules et de zombies, victimes de la
peste. Les skavens progressaient lentement à cause de nombreuses
embuscades et escarmouches. Ils commencèrent à perdre
un grand nombre de combattants, une résurgence de la grande
peste éclatant dans leur propres rangs. Skrittar, le Prophète
Gris rappela aux seigneurs de guerre les leçons apprises en
combattant Nagash durant la guerre du Pic Dolent. Ils abandonnèrent
alors Sylvania pour trouver une proie plus facile.
Middenheim avait plutôt
bien résisté à la famine et à la peste.
Le comte Mandred avait fait tout ce qu'il avait pu pour aider les
réfugiés qui affluaient du sud et les prêtres
d'Ulric tenaient la peste en échec. Bien défendue et
sise au sommet d'un pinacle rocheux au cœur de la forêt,
Middenheim n'avait rien à craindre d'une attaque et avait suffisamment
de réserves pour supporter un siège.
En 1118, une immense horde
de skavens émergea des forêts qui entouraient Middenheim
et cerna la ville. Les citoyens eurent à peine le temps de
détruire les quatre viaducs avant que ne s'y engouffrent les
guerriers des clans. Quelques jours plus tard, les skavens infiltrèrent
les tunnels qui se trouvaient sous Middenheim, menaçant d'investir
la cité par en dessous. Mais le comte Mandred organisa une
brillante défense, combinant barricades, inondations et contre-attaques
des chevaliers du Loup Blanc dans les tunnels. Souvent, le comte patrouillait
en personne dans les galeries, remontant le moral de ses guerriers
surmenés. Les fiers guerriers de Middenheim tenaient la horde
malfaisante en respect et le comte Mandred était acclamé
comme le sauveur de la cité.
Des mois de guérilla
dans le labyrinthe souterrain de la cité s'ensuivirent. Parfois,
une poignée de skavens parvenait à atteindre la surface
et causait de grands dommages avant d'être traqués et
exterminée. A l'approche du printemps, la horde des skavens
était trop diminuée pour maintenir le siège,
elle se replia en laissant tout de même une forteresse secrète
dans les tunnels de la ville.
En cadeau d'adieu, les enfants
du Rat Cornu répandirent la peste dans Middenheim, déjà
éprouvée par la rigueur de l'hiver et par la surpopulation
due aux réfugiés qui avaient fui les skavens, Dans une
telle promiscuité, l'épidémie s'étendit
à une vitesse foudroyante mais, miraculeusement (comme les
prêtres d'Ulric tiennent à le faire remarquer), la peste
semblait avoir perdu de sa virulence et seul un tiers des victimes
en mourut.
En 1122, le comte Mandred réunit
assez de troupes parmi les survivants pour mener une croisade contre
les skavens et les chasser de l'Empire. La famine et les dissensions
internes avaient sérieusement diminué les rangs skavens.
Au cours des deux années qui suivirent, un grand nombre de
batailles furent livrées en Averland, dans le Reikland et dans
les Collines Hurlantes. De nombreuses escarmouches eurent lieu autour
des villages et des fermes en ruines. Peu à peu, les skavens
furent repoussés hors de l'Empire.
C'est en 1124 que les skavens
furent enfin repoussés jusque dans les entrailles de la terre.
Le comte Mandred, le Tueur de Skavens fut reconnu par tous comme le
sauveur de l'Empire et couronné Empereur. De nombreuses forteresses
ne furent jamais trouvées et les esclaves ne furent pas tous
libérés, mais les skavens étaient amoindris par
les guerres. Les Seigneurs de la Ruine réalisèrent qu'encore
une fois, ils étaient trop faible pour liquider purement et
simplement les humains de l'Empire. En vérité, les skavens
avaient capturé tellement d'esclaves qu'ils commençaient
à être dépassés par le nombre dans certaines
parties de leur empire souterrain et que le Conseil des Treize craignait
une rébellion. Il se réunit encore une fois à
Skarogne et décida de consolider ses positions et de reconstituer
les effectifs des clans guerriers avant d'envisager un nouvel assaut
contre l'Empire.
Au cours des vingt cinq années
qui suivirent, l'Empire se remit sur pied avec une rapidité
qui prit au dépourvu les Seigneurs de la Ruine. Sous le règne
énergique de l'Empereur Mandred, les villes furent rebâties
et les terres repeuplées par les réfugiés qui
avaient fui vers Kislev et la Bretonnie. Pire encore, Mandred avait
instauré une garde permanente visant à contrecarrer
les skavens, mettant en place des organisations de surveillance, telles
que la garde des égouts. Dans le Cloaque, le Conseil fut occupé
par une révolte d'esclaves, et des cas de Peste Noire dépeuplèrent
plusieurs forteresses. Le Conseil se réunit lors de l'hiver
1151/1152. Les réprimandes fusèrent entre les Seigneurs
de la Peste et les autres Seigneurs de la Ruine, assorties de demandes
de réparation et de tentatives d'assassinats. La décision
de remettre à plus tard les opérations contre l'Empire
fut finalement prise.
Afin de préserver leurs
dernières forteresses dans l'Empire, les membres du Conseil
des Treize commanditèrent l'assassinat de l'Empereur Mandred,
le Tueur de Skavens. Un maître assassin du clan Eshin nommé
Nartik parvint à s'introduire dans le palais et à éliminer
l'Empereur dans le courant de l'année qui suivit. Fort habilement,
le tueur laissa des preuves de la culpabilité d'un mutant avant
de s'échapper par les égouts.
Comme le Conseil l'avait prévu,
les comtes électeurs furent incapables de s'entendre pour la
succession et retombèrent dans leurs rivalités territoriales
et personnelles. Au cours de l'hiver qui suivit, l'Empire sombra à
nouveau dans une période de guerres civiles qui offrit aux
skavens l'opportunité de reprendre du poil de la bête.
Au fil des générations, les érudits de l'Empire
échouèrent à établir une relation entre
les incursions skavens et la Peste Noire, ce qui conduisit l'Empire
à sous-estimer la menace. En moins de deux siècles,
ce que l'on savait sur les skavens fut tellement entouré de
légendes que bien des hommes instruits se mirent à douter
de leur existence.
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